Même à distance, les Docteurs Zinzins n’ont jamais cessé leurs visites extra-ordinaires auprès des enfants hospitalisés

Rire, en ce moment, est devenu plus essentiel que jamais. Et d’autant plus pour les enfants hospitalisés qui ne peuvent plus recevoir autant de visites, ni interagir aussi librement qu’avant avec leur environnement aseptisé. Dans ce contexte, les Docteurs Zinzins, des clowns hospitaliers, n’ont rien voulu lâcher malgré l’interdiction de se rendre sur place. Ils ont rapidement apprivoisé l’outil numérique et en ont même tiré certains avantages. Tout cela pour continuer, coûte que coûte, à offrir une bulle d’oxygène et de rire aux enfants malades. Hospichild a eu l’honneur d’interviewer deux de ces clowns hors du commun : Thierry Boivin, dit Biscuit, et Sophie Bonhote, dite Aglagla. 

Crédit photo : Docteurs Zinzins

 

Depuis le mois de mars 2020, les métiers du spectacle sont à l’arrêt. Si certains ont trouvé des parades numériques pour continuer à pratiquer leur métier, c’est loin d’être une généralité. Pour les Docteurs Zinzins, ces clowns qui se relaient au chevet des enfants hospitalisés depuis 1992 à l’Hôpital des Enfants, la parade virtuelle a plus ou moins fonctionné. Mais, comme l’ont confié Biscuit et Aglagla à Hospichild, « il a fallu s’adapter et trouver de nouvelles façons de se donner en spectacle. Si certains avantages ont pu surprendre agréablement, le contact humain reste primordial et ne devra jamais être remplacé par une relation par écrans interposés. »

Maintenir coûte que coûte le contact avec les enfants

Ce qui était primordial également pour les Docteurs Zinzins, c’était de garder coûte que coûte le contact avec les petits patients hospitalisés. Il fallait absolument continuer à les faire rire. Si au début de la crise, seuls les appels vidéos étaient possibles, il leur est désormais accordé de voir certains enfants dans le jardin de l’hôpital. Mais, contrairement à Saint-Luc ou Erasme au sein desquels ‘Les Clowns à l’hôpital’ ont désormais le droit d’être présents dans les chambres, la plupart des rencontres avec les enfants hospitalisés à l’Huderf restent encore virtuelles pour le moment. « C’était très compliqué au début de s’organiser pour maintenir le contact », a souligné Sophie Bonhote. « Mais grâce aux éducateurs qui font le lien sur place et qui entrent dans la chambre de l’enfant avec la tablette, on a pu petit à petit mettre en place une routine qui fonctionne. »

L’implication indispensable du personnel soignant

L’implication des éducateurs ou des autres membres du personnel soignant est effectivement indispensable dans ce genre de situation, parce que l’enfant peut parfois se sentir mal à l’aise devant l’écran et avoir besoin d’être rassuré par une personne qu’il connaît. « Ce qui est magnifique, c’est que la plupart du temps, les éducateurs décident de rester avec l’enfant pendant l’appel. Ils s’impliquent et jouent avec nous pour rendre le moment encore plus réussi. On s’est rendu compte que, finalement, les professionnels aussi avaient besoin de décompresser et de rire. D’ailleurs, pour les remercier on a plusieurs fois organisé des sessions zoom rien que pour eux et, plus récemment, on s’est même donné rendez-vous à l’extérieur pour danser sur l’air de Jerusalema. C’était vraiment très gai. » 

« Il a fallu apprivoiser l’outil numérique »

Gérer et maîtriser les sessions Zoom et les contacts virtuels avec les enfants fut l’un des challenges les plus importants pour les Docteurs Zinzins. Et pour expliquer la façon dont l’outil numérique a été à la fois un frein et une aubaine pour eux, rien de tel que de laisser la parole, en vidéo, à nos deux interlocuteurs.

Rencontrer pour la première fois un enfant quand on est à distance

Une autre difficulté évoquée fut le moment délicat de la première rencontre virtuelle avec l’enfant hospitalisé. Thierry et Sophie ont par exemple expliqué : « Il y a eu ce contact un peu chaotique avec une adolescente qui ne nous trouvait pas drôles et qui semblait peu réceptive à notre démarche. On a néanmoins continué en jouant dans son sens, en lui donnant raison ; on a fait un peu de musique aussi. Finalement, on a eu un retour de la psychologue qui nous a dit à quel point elle avait apprécié notre rencontre et qu’elle avait fondu en larmes à la fin de l’appel tant c’était difficile de nous quitter. »  

Les deux clowns ont ensuite évoqué la manière dont ils ont interagi avec un petit garçon italien hospitalisé en oncologie qui les voyait également pour la première fois : « On a commencé très loin de l’écran et on jouait au ballon. Ensuite, on s’est rapproché doucement en l’impliquant petit à petit afin de lui laisser le temps d’entrer dans notre jeu. À un moment, la balle est tombée et on lui a demandé en italien si il savait où elle était partie… Ça l’a fait rire et là on a su que c’était gagné et qu’on pouvait continuer comme d’habitude. » 

Quid de la suite ?

Depuis quelques semaines, les clowns de l’association ont à nouveau la possibilité de se rendre à l’hôpital et de rencontrer des enfants en présentiel, mais seulement en extérieur. La dernière visite en date était assez inhabituelle puisque Biscuit et Aglagla ont eu la possibilité d’interagir, pour la deuxième ou troisième fois, avec des enfants autistes de l’ Unité A.P.P.I à l’Huderf. Âgés de 1 à 3 ans, ils étaient assez fascinés par la musique et plutôt réceptifs ; ce qui a agréablement surpris les éducateurs.

Évidemment, d’autres enfants hospitalisés peuvent également bénéficier de cette bulle d’oxygène au grand air s’ils le souhaitent ou s’ils en ont l’autorisation. Et si ce n’est pas le cas, les sessions Zoom continuent, et continueront, à prendre le relais. « L’expérience du virtuel est utile et souvent bénéfique pour les enfants, mais il ne faudrait quand même pas que ça remplace nos visites en présentiel sous prétexte que cela fonctionne bien. On a besoin et on a envie d’être physiquement présents pour les enfants », a finalement conclut Thierry Boivin.

 

Sofia Douieb

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