Pédopsychiatrie : BACAP, la nouvelle association professionnelle et nationale

Tout récemment, BACAP – pour Belgian Association of Child and Adolescent Psychiatry – a vu le jour. Cette nouvelle association professionnelle, fondée sur une collaboration étroite entre francophones et néerlandophones, fédère l’ensemble des pédopsychiatres du pays. Son ambition ? Défendre leur pratique tout en construisant une santé mentale accessible, rapide et adaptée aux besoins des enfants et adolescents. Forte d’un ancrage solide via la VVK et l’APPIJF, BACAP milite pour une reconnaissance pleine de la pédopsychiatrie. Le journal Le Spécialiste a recueilli les propos de la Dre Sofie Crommen, présidente de l’association.

{ Propos de la Dre Sofie Crommen, présidente de BACAP, par le journal Le Spécialiste }

« L’association vise non seulement à défendre les intérêts des pédopsychiatres, mais aussi à contribuer structurellement à une santé mentale réellement adaptée aux enfants et aux adolescents : rapide, accessible et centrée sur leurs besoins. BACAP s’engage pour une représentation solide à tous les niveaux décisionnels, pour une formation et une pratique de qualité, et pour une collaboration interdisciplinaire. Un enjeu majeur est la reconnaissance distincte de la pédopsychiatrie comme spécialité à part entière. Actuellement, seul le titre général de médecin spécialiste en psychiatrie existe au niveau 2, avec une sous-spécialisation en pédopsychiatrie au niveau 3. Cela ne reflète pas la complexité et l’expertise spécifiques de notre discipline. 

BACAP  fédère les pédopsychiatres de toutes les régions du pays et s’appuie sur les réseaux existants. Nos liens avec la Vlaamse Vereniging voor Kinder- en Jeugdpsychiatrie (VVK) et son pendant francophone, l’Association Professionnelle des Psychiatres Infanto-Juvéniles Francophones (APPIJF), sont non seulement étroits, mais aussi ancrés dans une structure commune. »

En tant que présidente fondatrice de BACAP et forte de seize années à la tête de la VVK, je mets mon expérience et mon engagement au service de l’ensemble de la pédopsychiatrie belge, en étroite collaboration avec mon collègue Benjamin Wolff, président de l’APPIJF et vice-président de BACAP. Cette coopération fait de BACAP une association professionnelle largement soutenue et représentative, fondée sur l’expertise et l’engagement partagé.

Redéfinir les priorités : l’ambulatoire avant tout

La santé mentale des enfants et des adolescents est aujourd’hui sous forte pression. Plus que jamais, les jeunes sont confrontés à des défis tels que les réseaux sociaux, la pression des performances, les tensions familiales ou des environnements éducatifs peu sécurisés. Des études montrent qu’environ 6 % des jeunes souffrent de troubles psychiques sévères. Bien que les investissements récents dans l’aide psychologique de première ligne pour les troubles légers à modérés soient un pas dans la bonne direction, les soins pour les jeunes confrontés à des problèmes psychiques graves restent négligés. BACAP entend remettre sur la table l’urgence d’une offre ambulatoire accessible et bien organisée pour cette population.

Aujourd’hui encore, l’accent est trop souvent mis sur les prises en charge résidentielles, alors que des soins ambulatoires, plus proches du cadre de vie des enfants et des adolescents, sont souvent préférables. Une hospitalisation n’est pas toujours nécessaire ; ce qui est en revanche crucial, c’est une évaluation rapide et experte, suivie d’un parcours de soins adapté. Or, ces parcours font largement défaut. Les consultations ambulatoires sont extrêmement rares et les équipes mobiles réservées aux situations complexes nécessitant des interventions à domicile. Résultat : les enfants ne sont souvent pris en charge que lorsque la situation a déjà dégénéré.

Une deuxième ligne solide, fondée sur la collaboration

BACAP plaide donc pour une deuxième ligne bien structurée, reposant sur la collaboration multidisciplinaire. Il s’agit d’organiser des cabinets ambulatoires avec un·e assistant·e pour l’appui administratif et médical, des psychologues cliniciens et des orthopédagogues pouvant réaliser, sur indication, des diagnostics, de la psychoéducation et des thérapies spécialisées. Ce modèle est réaliste, à condition que les pédopsychiatres disposent des ressources financières pour constituer une équipe et que les soins psychologiques de deuxième ligne soient remboursés de manière structurelle.

Aujourd’hui, le système de remboursement, largement insuffisant, freine cette collaboration. Les psychologues et orthopédagogues de deuxième ligne ne sont pas systématiquement rémunérés, ce qui prive de soins essentiels ou ralentit considérablement leur accès. Les pédopsychiatres sont souvent isolés, alors même que la collaboration avec d’autres professionnels est indispensable pour élaborer un plan de traitement efficace et durable.

Une mobilisation collective

Avec BACAP, nous voulons faire la différence. Nous construisons un réseau dynamique de spécialistes engagés, nous impliquons les assistants en formation et nous recherchons activement le dialogue avec d’autres professionnels de la santé, les associations de patients et les décideurs politiques. Par notre présence dans les groupes de travail, les commissions d’agrément francophones et néerlandophones, les organismes d’accréditation et les conseils consultatifs, nous contribuons à une formation de qualité, à une meilleure reconnaissance et à une meilleure visibilité de notre discipline.

Avec cette nouvelle association professionnelle, nous faisons résolument le choix du lien : entre collègues, avec l’ensemble du secteur des soins et avec la société. Car les enfants et les jeunes méritent une santé mentale réellement à leur mesure. Forte de son expertise, de son engagement et de sa détermination, la communauté des pédopsychiatres assume pleinement ses responsabilités. »

 

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