Victoire pour l’inclusion scolaire en FWB : des mesures devront être prises

Cela fait quatre ans que le secteur du handicap attendait cette victoire. Les conclusions du Comité européen des Droits Sociaux ne laissent aucune place au doute : il existe bel et bien une violation de la Charte sociale européenne révisée pour le manque d’efforts consentis par la Fédération Wallonie-Bruxelles dans la promotion de l’accès à l’enseignement ordinaire des élèves avec un handicap intellectuel. Pour se remettre en conformité avec la loi, des mesures devront impérativement être prises par les ministres compétents.

Cette violation est double et vient s’ajouter aux précédentes condamnations en la matière :

  • violation de l’article 15§1 de la Charte8 aux motifs que le droit à l’éducation inclusive des enfants ayant une déficience intellectuelle n’est pas effectivement garanti en Communauté française de Belgique ; 
  • violation de l’article 17§2 de la Charte9 au motif que les enfants atteints d’une déficience intellectuelle ne jouissent pas d’un droit effectif à l’éducation inclusive en Communauté française.

Ce qui est revendiqué pour favoriser l’inclusion

Depuis 2017, date de la réclamation collective soumise au Comité européen des Droits Sociaux, les associations représentatives des personnes en situation de handicap intellectuel (Inclusion asbl, Inclusion Europe…) et les organisations de lutte contre la discrimination (UNIA) et de défense des droits des enfants (Délégué général aux droits de l’enfant, FIDH – International Federation for Human Rights), demandent à la Fédération Wallonie-Bruxelles :
  1. d’adopter un plan de transition vers une école inclusive. Les objectifs fixés par le Pacte pour un Enseignement d’excellence restent encore trop peu ambitieux. Ce plan sera assorti d’échéances claires et d’indicateurs afin d’évaluer la poursuite des objectifs ;
  2. de prendre en compte sans ambiguïté les élèves ayant un handicap intellectuel dans l’ensemble des dispositions visant à rendre le système scolaire plus inclusif. Nous pensons notamment au futur décret relatif aux pôles territoriaux, à la règlementation concernant les aménagements raisonnables et à la réforme de l’orientation et de la formation initiale des enseignants. Les moyens financiers alloués aux pôles devront être en mesure de réaliser pleinement cette ambition. Ils devront aussi permettre d’apporter un accompagnement à ces élèves par des professionnels formés (orthopédagogues, logopèdes) ;
  3. de prévoir des incitants pour soutenir les écoles développant une réelle politique inclusive ; Parmi ces mesures, on peut envisager notamment, une révision de la pondération dans le calcul du nombre d’élèves ;
  4. de créer un « budget d’éducation personnalisé » à destination des élèves et des familles ;
  5. d’intégrer le soutien scolaire par des professionnels compétents (ergothérapeute, logopèdes…) au niveau des dispositifs d’aide individuelle de l’AViQ, de PHARE et d’Iriscare et revaloriser les moyens des services d’accompagnement en milieu scolaire ;
  6. de renforcer la formation initiale et continue des enseignants et créer une filière courte/cours du soir pour la formation en orthopédagogie.

Réaction rassurante de Caroline Désir, ministre de l’Education

Bien sûr, depuis ces revendications datant de 2017, la situation a quelque peu évolué. Présente lors de la conférence de presse du 3 février annonçant cette victoire, la ministre de l’Education Caroline Désir s’est montrée rassurante et positive. Elle a tenu a rappeler que des progrès ont déjà été fait depuis l’adoption du Pacte d’excellence en 2018 : introduction d’un décret d’aménagement raisonnable, possibilité d’accompagnement par un.e lagopède dès la maternelle, abaissement à 5 ans de l’âge d’obligation scolaire… La mise en place des 17 classes inclusives dans des écoles ordinaires (y compris dans le secondaire) est également un grand pas.

La ministre est néanmoins consciente du chemin qu’il faut encore parcourir pour combler tous les manquements évoqués. Elle a d’ailleurs proposé aux forces en présence d’organiser prochainement des tables rondes pour décider de la prise en charge des élèves extraordinaires tout en tenant compte de la réalité du terrain.

Et de conclure : « J’ai bien entendu les revendications et je les relaierai aux ministres compétents. Chaque élève doit être suivi de manière adaptée. Je suis consciente que la FWB ne respecte pas toutes les injonctions européennes; c’est la raison pour laquelle nous ferons tout, dans un délai plus ou moins long, pour y parvenir. »

Témoignages sur les difficultés de scolarisation

Ce qui ressort des différents témoignages de parents concernant la scolarité inclusive de leur enfant à besoins spécifiques, c’est que cela s’apparente à un véritable parcours du combattant. Pour autant qu’ils parviennent à lui trouver une place dans l’enseignement ordinaire, ce qui est loin d’être aisé, l’inclusion devra presque obligatoirement prendre fin avant l’entrée en secondaire. La cause ? L’obligation de l’obtention de la certification (CEB, CE1D) – sans différenciation possible des objectifs attendus – durant le parcours scolaire. Espérons donc que la condamnation de la Belgique puisse enfin sortir ces enfants de des situations inextricables…

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