Musique en pédiatrie : une matinée avec l’asbl « Une note pour chacun »

Depuis 1992, 30 ans ce mois d’avril, l’asbl Une note pour chacun organise des activités musicales pour les enfants malades dans quatre hôpitaux bruxellois. Grâce à leurs instruments, les musiciens introduisent une dimension créative et imaginaire au cœur des services pédiatriques. Le temps d’une matinée, Hospichild a accompagné Christian Merveille, président de l’association, musicien et poète, ainsi que Pascale de Laveleye, fondatrice et musicienne, au sein de la petite école de l’Hôpital des Enfants. Reportage. 

Pascale de Laveleye, fondatrice et musicienne et Christian Merveille, président de l’association, musicien et poète –  © Sofia Douieb

 

Dans la classe maternelle de l’école Robert Dubois ce matin-là, une ribambelle d’enfants, malades et/ou hospitalisés au sein du service pédiatrique de l’Huderf, s’étaient regroupés autour de la grande table où des jus, des biscuits et toute sortes de petits encas leur étaient proposé. Parmi eux, certains étaient sous oxygène, d’autres portaient des bandages ici ou là, d’autres encore étaient assis sur des chaises roulantes. Mais tous chantaient à tue-tête en riant de bon cœur. Leur chef d’orchestre : Pascale de Laveleye, fondatrice d’Une note pour chacun et musicienne. Ils entonnaient les paroles de « Marmiton », une chanson que les enfants ont eux-mêmes écrite et enregistrée (dans le cadre du projet « La culture a de la classe » subsidié par la Cocof).

Création de chansons avec les élèves de l’école Robert Dubois

Cette matinée avec les enfants était particulière, voire symbolique. Les deux membres de l’association sont venus remettre des CD aux enfants ; le fruit de leur travail. Mais seules les voix de certains d’entre eux figurent effectivement sur « Marmiton ». Forcément ils ne sont, pour la plupart, que de passage dans cette école et heureusement d’ailleurs, parce que ça veut dire qu’ils vont mieux, qu’ils sont peut-être même guéris. Ce projet d’enregistrement d’un disque est un des nombreux projets de l’association. Sur une durée de trois mois, une fois par an, deux musicien.ne.s proposent aux enfants d’écrire des paroles, de choisir la musique qui leur plait, d’enregistrer leur voix, de dessiner la pochette du disque…

© Sofia Douieb

Apprendre à s’exprimer par le chant et la musique

Cette année, il y a donc le CD « Marmiton » sur le thème de la cuisine et celui d’« Europa », enregistré avec les élèves de primaire, qui parle de la vision qu’ils ont de l’Europe. « En plus de s’amuser et de collaborer à un projet artistique, les enfants apprennent des choses. Le sujet est intégré au cours pour l’approfondir et ancrer la connaissance. C’est un réel enrichissement pour eux d’aborder des thématiques en musique », a expliqué l’une des maitresses, tout en rangeant les petits bols multicolores. Et puis le côté thérapeutique du chant et de la musique sont bel et présents. Ces instants permettent aux enfants de s’évader quelques heures, de s’exprimer, d’être des artistes et non pas juste des malades au sein d’un hôpital… Quand ils écoutent ensuite le résultat de cette collaboration, même s’ils ne sont plus malades, les enfants se rappellent de leur ancienne condition et gardent ce CD comme une trace ou un talisman.

Collaborations avec de grands artistes : « Nous faisons de la musique de qualité ! »

« En plus, nous faisons de la musique de qualité », intervint alors Christian Merveille. « Savez-vous que nous avons collaboré avec de très grands artistes comme Adamo, Marka et bien sûr José Van Dam, qui est notre parrain ? Quand les textes et les airs musicaux élaborés par les enfants sont chantés par de grandes voix, c’est forcément plus porteurs et ils en sont tous très fiers. » Bien que ces collaborations datent un peu, le symbole reste bien présent et donne une certaine prestance à l’association. Ces artistes sont venus rendre visite plusieurs fois aux enfants, en se mettant à leur hauteur. Christian Merveille a par exemple raconté : « Un jour, José Van Dam est arrivé avec une belle boite remplie de bonbons ; il en a proposé à un petit garçon ayant le diabète et ne pouvant donc pas en manger. Ni une ni deux, il a renversé les friandises sur la table et lui a dit qu’il aurait alors la boîte rien que pour lui… » Si, la plupart du temps, les chansons n’évoquent pas la maladie ou l’hospitalisation, il est arrivé que certaines en parle. C’est notamment le cas du CD « Attrape ma chanson » qui parle des maladies qui ne sont pas contagieuses ; qui ne s’attrapent pas, mais qui font quand même peur au grand public. À tel point que, bien souvent, les enfants sont discriminés ou rejetés de la société.

Cours de musique et chansons à la carte dans les services pédiatriques

Frédérique Fremaux
Frédérique Fremaux, directrice de l’École Robert Dubois – © Sofia Douieb

Quand ils ne créent pas de chansons avec les petits élèves, les six musiciens d’Une note pour chacun se relaient au sein des services pédiatriques de quatre hôpitaux différents : Erasme, Saint-Luc, Saint-Pierre et l’Hôpital des Enfants. « Pendant le confinement, on n’a pas pu se rendre sur place, alors on utilisait Zoom via un robot qui roulait vers les lits des patients. Ce n’était pas l’idéal forcément, mais ça nous a permis de garder le contact », s’est exprimé Pascale de Laveleye. « À présent qu’on peut y retourner, les activités ont repris comme avant : chant dans les chambres, cours de musique… » 

Quelques mots sur l’école Robert Dubois

L’initiative de création de chansons est donc initiée par l’asbl Une note pour chacun et a lieu à l’école Robert Dubois. Pour rappel, c’est un réseau d’écoles d’enseignement spécialisé de type 5. Les sept implantations réparties sur tout le territoire bruxellois sont destinées à accueillir des enfants et des adolescents hospitalisés ou qui suivent un traitement ambulatoire (hospitalisation de jour). Le site visité est le principal ; celui relié à l’Huderf. Les cours sont donnés soit en classe, soit au chevet de l’enfant au sein des différentes unités. Pour en parler brièvement, la directrice des lieux, Frédérique Fremaux : « Les enseignants suivent le programme de l’école de l’enfant et se calquent sur son niveau. Il est essentiel qu’il ne prenne pas de retard et maintienne ses capacités. Il y a néanmoins une dimension moins contraignante puisque c’est plus un droit qu’une obligation. Et un accent particulier est mis sur l’intervention d’artistes : des musiciens, des comédiens, des clowns, des acrobates… Des sorties au théâtre, au musée, à la bibliothèque sont également prévues quand la santé des enfants le permet. Il s’agit de créer pour eux un environnement positif, un genre de bulle bienveillante où ils ne sont rien d’autre que des enfants. »

Sofia Douieb

 

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