Initiatives

ALBaT®OS : projet pilote de l’UZ Brussel pour réduire les listes d’attente en logopédie

Les longues listes d’attente en logopédie sont une source de frustration pour de nombreux parents et professionnels de santé. Ce problème, bien connu depuis longtemps, empêche les enfants de recevoir l’aide nécessaire en temps voulu. Pour y remédier, l’UZ Brussel met en place un projet pilote innovant, financé par la Vlaamse Gemeenschapscommissie et l’Agence Opgroeien, destiné à offrir un soutien rapide et accessible aux enfants souffrant de troubles du développement du langage.

Des avancées majeures ont été faites ces derniers mois dans le secteur de la logopédie. Hospichild se réjouissait notamment, au sein d’un article, du remboursement enfin équitable des séances de logopédie. Mais d’autres problématiques subsistent, comme les listes d’attente interminables pour l’obtention de soins.Pour tenter d’y remédier, le Centre pour les troubles du développement de l’UZ Brussel a dévoilé le projet ALBaT®OS, qui tend à « offrir des formes d’apprentissage alternatives et des parcours d’accompagnement pour venir en aide aux enfants souffrant de troubles du développement du langage dans la Région de Bruxelles-Capitale ». Les troubles du développement du langage, qui affectent environ 7 % des enfants, ralentissent et modifient la manière dont les enfants comprennent et utilisent le langage. Ce problème est particulièrement prononcé chez les enfants multilingues, qui rencontrent des difficultés tant dans l’apprentissage de leur langue maternelle que dans celle parlée à l’école.

Un projet pilote prévu pour l’automne 2024

Le projet pilote débutera à l’automne 2024. Ellen Van Den Heuvel, coordinatrice du projet, explique : « Concrètement, des logopèdes néerlandophones à Bruxelles lanceront un programme dans deux écoles néerlandophones. Ce programme visera à aider les enfants présentant des troubles du développement du langage et à fournir aux parents des outils pratiques pour soutenir le développement linguistique de leurs enfants. L’objectif est d’améliorer la communication familiale et de réduire les frustrations, en impliquant un maximum de partenaires, de l’école aux parents. Nous organiserons des séances dans les écoles pour offrir un soutien proche et accessible aux familles. Nous espérons ainsi offrir un soutien alternatif ou complémentaire aux séances individuelles. »

ALBaT®OS symbolise l’entraide et l’échange

ALBaT®OS s’apparente à une métaphore, illustrant l’entraide et l’échange d’expertise au sein du réseau pour développer des méthodes de travail efficaces. À la fin de ces parcours en décembre, leur efficacité sera évaluée pour déterminer si ce projet peut être étendu et améliorer le soutien aux enfants avec des troubles du développement du langage, ainsi que réduire les listes d’attente en logopédie.

Limiter les retards de traitement logopédique individuel

Eva Cloet, directrice du Centre pour les troubles du développement de l’UZ Brussel, ajoute : « En développant un parcours accessible et scientifiquement fondé, nous visons à limiter les retards de traitement logopédique individuel. Le projet ALBaT®OS aide les logopèdes de Bruxelles à explorer des thérapies courtes et alternatives, comme les approches de groupe, le coaching parental, et les parcours intensifs parents-enfants. » Ce projet représente donc une lueur d’espoir pour de nombreuses familles et professionnels de santé à Bruxelles, en offrant des solutions innovantes et accessibles pour un problème de longue date.

 

Sofia Douieb

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Handicap et inclusion : quel avenir pour les futurs adultes sur le marché du travail ?

Dans ce vaste marché du travail, les enfants en situation de handicap sont potentiellement les futurs travailleurs de demain. C’est en tout cas ce que peuvent se dire leurs parents qui les accompagnent et qui espèrent le meilleur pour eux ! En attendant, comment les préparer et comment favoriser leur inclusion ? À l’initiative de la Fondation Roi Baudouin, une récente étude révèle qu’une majorité des personnes en situation de handicap juge leur inclusion insuffisante au sein de leur milieu professionnel.

Le taux d’emploi des personnes avec un handicap en Belgique est de seulement 41,1% ; un des plus bas d’Europe. Les résultats de l’étude de la FRB démontrent bel et bien le mal être ressenti et le peu de considération accordé à cette catégorie de la population sur le marché du travail. Le constat est clair : peu de place est accordé à la différence et trop à l’indifférence. Vers un processus de déstigmatisation du handicap, il semble indispensable d’en finir avec les préjugés, car même un handicap peut être une force, sans oublier d’autres compétences qui peuvent prévaloir et assurer un avenir professionnel aux futurs adultes.

{Communiqué de presse de la Fondation Roi Baudouin sur la thématique « Justice sociale et pauvreté »}

« Dans le cadre de son action en faveur de l’inclusion des personnes en situation de handicap dans la société, la Fondation Roi Baudouin a voulu aller à l’écoute de ces personnes afin de mieux comprendre leur rapport au travail. C’est l’agence Indiville, spécialiste dans ce type de recherche, s’est donc chargée de questionner pas moins de 1.028 participants provenant de la Région bruxelloise, de Wallonie ainsi que de Flandre. Et Parmi elles, des personnes avec des déficiences physiques, des troubles psychiques ou des maladies chroniques ont participé à cette étude, complétée d’une dizaine d’entretiens individuels. Les résultats offrent un panorama dense et précis du monde du travail, mais aussi de l’information relative aux aides financières, à la reconnaissance du handicap, le tout vu par les premiers concernés. Ils sont présentés ce mardi 30 avril à la ministre chargée des Personnes handicapées et au ministre chargé de l’Emploi, dans le cadre de l’événement « L’emploi des travailleurs en situation de handicap – quelle visibilité aux yeux des employeurs et des militants syndicaux » qui se déroule dans les locaux du SPF Emploi.

Aides financières : un déficit d’informations

Premier constat : plus de 30 % des personnes interrogées déclarent ne pas bénéficier d’aides financières en lien avec leur handicap, ou ne savent pas si elles en reçoivent. Parmi celles-ci, 37 % indiquent ne pas savoir où solliciter ces aides, soulignant l’énorme gouffre informationnel dont pâtissent les personnes en situation de handicap. 63 % des répondants ne sont pas non plus certains de recevoir toutes les aides auxquelles ils ont droit – un pourcentage qui grimpe à 76 % pour les répondants avec un faible niveau d’éducation. Or, ces aides sont jugées essentielles : 82 % les considèrent comme ‘cruciales’ pour joindre les deux bouts.

L’importance de sensibiliser les plus fragilisés

Une fois la reconnaissance du handicap acquise, le flou prévaut souvent quant aux conséquences de la perception d’une aide financière, notamment sur l’emploi : est-ce que le fait de travailler implique la diminution ou la suppression des aides ? Les personnes les mieux informées se situent parmi les catégories de répondants au niveau d’instruction élevé. Ce constat souligne l’importance de cibler prioritairement les personnes les plus fragilisées dans tout effort de sensibilisation. Par ailleurs, les experts dans le domaine du handicap estiment que les définitions administratives du handicap sont, de manière générale, étriquées, trop centrées sur l’incapacité à travailler et pas assez sur l’inclusion, contribuant ainsi à cristalliser une identité fondée sur le handicap.

Obstacles à l’emploi

Nombreuses sont les personnes en situation de handicap à considérer l’activité professionnelle comme un facteur d’épanouissement, une façon de se sentir utile, de créer du lien social. Si certaines ressentent une pression (familiale, amicale, sociale) pour travailler, d’autres s’accrochent à tout prix à l’inclusion par l’emploi, quitte à s’infliger une pression considérable. 44 % des personnes sondées privilégient par ailleurs le bénévolat, gage d’une moindre pression. 67 % des répondants estiment en outre que leur embauche constituerait une plus-value pour le monde du travail (entreprises, associations, administrations), à condition toutefois que celle-ci soit reconnue et que les employeurs agissent davantage en faveur de leur inclusion.

Comment faire taire les préjugés ?

En vue de décrocher un entretien et trouver un emploi adapté, les personnes en situation de handicap doivent naviguer dans un environnement concurrentiel, affronter préjugés et discriminations. La grande majorité (65 %) des personnes interrogées est convaincue que, lors d’un processus de sélection, la personne valide sera toujours privilégiée à la personne en situation de handicap. Tous les répondants aimeraient que leurs compétences soient accueillies sans préjugés, dans un environnement inclusif. 75 % des personnes sondées estiment qu’il est nécessaire d’encourager davantage les employeurs à engager des personnes en situation de handicap et de mieux les informer sur les besoins de ce public particulier. Les formes de soutien les plus attendues sont une adaptation du poste de travail et des tâches, ainsi qu’un écart salarial plus important avec les allocations perçues. Les professionnels de l’insertion sont par ailleurs perçus comme étant trop généralistes, éloignés des besoins propres des personnes en situation de handicap.

Pistes pour une meilleure inclusion

Les résultats de l’étude et les témoignages des répondants mettent en évidence un certain nombre de constats, à partir desquels il est possible d’identifier différentes pistes pour favoriser l’inclusion des personnes en situation de handicap sur le marché du travail et, plus globalement, dans la société. Parmi celles-ci, on peut citer : une meilleure accessibilité de l’information relative aux aides et aux obligations d’aménagements sur le lieu de travail ; un cadre administratif moins stigmatisant, davantage axé sur l’inclusion et les compétences, plutôt que sur l’incapacité à travailler ; des efforts accrus de la part des employeurs pour atteindre l’objectif d’inclusion de 3 % des personnes en situation de handicap et pour aménager les tâches et les postes de travail ; un écart plus important entre salaire et aides financières ; un travail de déstigmatisation du handicap au sein de la société. »

Partagé par Samuel Walheer

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Urgence pédiatrique : quelle place pour les grands-parents ? (Témoignage)

Lorsqu’un enfant est admis aux urgence et que les soins intensifs prennent le relais (ou qu’une hospitalisation s’en suit), les parents sont les premiers concernés, en vigilance constante. Mais qu’en est-il des grands-parents dans ces cas-là ? Ils sont tout autant concernés, inquiets, démunis… Soucieux d’apporter leur aide et leur présence, ils sont souvent relégués à la salle d’attente et peu informés. C’est en tout cas ce qu’une grand-mère a ressenti lorsque son petit-fils s’est retrouvé à l’hôpital, entre la vie et la mort. Elle témoigne.

« En tant qu’abuela, mon nom de mamie, je me questionne encore aujourd’hui sur le rôle et la place du grand-parent à l’hôpital. Ce témoignage aidera peut-être d’autres grands-parents confrontés aux mêmes doutes et questions. Est-ce qu’on en fait assez, trop ? Comment soutenir son enfant pour qu’il puisse à son tour soutenir le sien ? Comment être présent sans prendre trop de place ? Comment faire taire ses émotions pour accueillir les leurs ? Comment écouter avec bienveillance et sérénité sans vouloir tout savoir ? 

Milieu de matinée plutôt ensoleillée. Plongée dans la rédaction d’un texte, la sonnerie de mon téléphone retentit et la photo de l’un de mes enfants apparaît sur l’écran. Je décroche, le sourire aux lèvres, déjà contente à la perspective de la conversation qui suivra. Une voix hachée suivie de pleurs change la donne en une fraction de seconde : « Maman, c’est grave, très grave, le petit est aux urgences, à l’hôpital ! Ils lui font un massage cardiaque, ça fait plus de 20 minutes, je prie, on prie… Ils sont à 4 au-dessus de lui, ils se relaient, j’ai peur ! » Au bout de quelques minutes d’explications parcellaires, coupées par les pleurs, je comprends qu’il s’est passé quelque chose de grave pour mon petit-fils, à peine âgé de 21 mois. Son cœur s’est arrêté alors qu’il passait un examen à la salle d’urgence. Heureusement, mon fils et ma belle-fille ont été réactifs. Ce matin, le petit avait apparemment les pieds et les mains glacés, il était somnolent et tombait littéralement endormi alors que sa maman l’habillait. S’ils avaient tardé, mon amour de petit-fils serait décédé à la maison.  

La nuit avait été perturbée par des pleurs, il avait un peu de température. La veille, le pédiatre l’avait ausculté sans pouvoir deviner la gravité de l’affection qui le terrasserait le lendemain. Il avait une petite toux, un peu de fièvre, quelques symptômes gastriques. Repos et hydratation au programme.  
Sa maladie, la myocardite aiguë, est plutôt rare dans l’ensemble de la population mais encore plus chez les enfants. Le pauvre médecin en sera désolé lorsqu’il apprendra plus tard la suite des événements.  

Je lâche ma souris, enfile mon manteau et informe ma collègue que je pars sur le champ à l’hôpital. Les enfants sont aux abois, ils ont besoin de moi.  

À l’hôpital, branlebas de combat. À peine arrivé aux urgences, notre petit est conduit aux soins intensifs pour une réanimation cardiaque de 30 minutes. Il y restera trois longues et affreuses semaines. Entre la vie et la mort. Chaque jour, le lot de mauvaises nouvelles s’ajoute à celles de la veille. On craint les séquelles consécutives à cette longue réanimation. Mise en place d’un ECMO ; en jargon médical, c’est un appareil qui prend le relai du cœur. Les poumons eux aussi rendent l’âme, il faudra un deuxième ECMO pour faire fonctionner les poumons. Ils sont « collés », il y a du sang dedans, il est en insuffisance rénale, me dit mon fils… Difficile en tant que grand-parent d’avoir des informations complètes et cohérentes. Quand je leur demande plus de détails, ils n’ont pas la force de me répondre, ils n’ont pas tout entendu, ni tout compris. C’est trop dur, trop effrayant.  

À l’immense détresse de mes enfants, s’ajoute la peur de perdre ce petit bonhomme d’amour. On reste en retrait dans le couloir du service des soins intensifs ou dans la salle d’attente. Peu à peu, on nous laisse entrer dans le service, muni d’une « tour de contrôle » au centre et des chambres disposées tout autour. Beaucoup de soignants vont et viennent avec des chariots de soins, des appareils qu’on n’a jamais vus.  

Dans les autres chambres, d’autres enfants se battent pour leur vie. Accidents de la route, transplantations, cancers… Les visages croisés sont gris, fatigués, en larmes, mais aussi parfois souriants et encourageants. Le personnel, -difficile de trouver les mots-, super héros ? Ils sont continuellement au chevet des enfants soignés. Dans notre cas, les alertes retentissent pratiquement toutes les 2 minutes. Ils arrivent en courant, rectifient les sondes, les cathéters, appellent le médecin de garde…  

De temps en temps, on tente d’écouter, de loin, les quelques explications données par l’infirmier en chef ou le médecin de garde, sans prendre trop de place. Nous ne sommes que les grands-parents, il est normal que les parents soient informés en premier et en aparté.  

Un infirmier me confie : « Je vous ai laissé partir la fois passée, sans vous parler, et j’ai bien vu que vous étiez dans l’effroi. Je ne veux plus qu’une telle chose se passe, cette fois je vais vous expliquer où nous en sommes. »  

Je vais ainsi apprendre que sa maladie est extrêmement grave mais qu’il se bat. Les complications s’enchainent. Une nuit, l’ECMO qui supporte le cœur se bouche ; il faut le remplacer en urgence. Salle d’opération, course contre la montre. On m’explique que les ECMO le maintiennent en vie mais qu’ils sont aussi sources de complications, que ça ne peut pas durer trop longtemps. Malgré tout, son cœur rebat de lui-même un peu plus chaque jour. Mais le plus difficile à entendre, c’est ce mot « effroi », alors que je pensais arriver avec un visage serein, prête à prendre mon rôle de maman protectrice auprès de mon fils et de ma belle-fille. Les émotions ne peuvent toujours se cacher.  

Les enfants sont si mal que je leur demande s’ils ont demandé l’aide d’un.e psychologue. Mais leur religion leur suffit me disent-ils en cœur, un brin courroucés. Le petit est entre les mains de Dieu. Pour moi, athée, c’est compliqué de leur expliquer qu’une aide psychologique est peut-être nécessaire en sus de la prière et du support familial et communautaire.  

Je discute beaucoup avec mon fils, on parle religion, croyance, soutien, prière, communauté, sens de la vie, destin… On regarde le soleil se coucher sur le parking des urgences et on arpente les couloirs désertés des visiteurs, en allant vers la chapelle qui accueille toutes les communautés religieuses. Je le prends dans mes bras, ses larmes coulent. Je suis sa maman, il redevient mon petit gars. J’ai envie de lui acheter un lapin comme quand il était petit. Un objet qu’il peut serrer quand il a peur de perdre tout espoir et même la foi. Mon fils m’émeut, j’admire sa force, sa résilience, son amour infini pour son petit.  

Deux semaines passent. Le petit est inerte dans son lit, une quinzaine de moniteurs relaient son état de santé et émettent des sons qui égrènent les minutes. Les pompes des ECMO produisent leur râle régulier. Au fil du temps, on apprend à déchiffrer certains écrans et les chiffres clés. Des fils, des tubes sortent de son cou et de chaque membre de son corps, reliés aux machines, à des poches, des drains. Il est si minuscule dans ce lit ultra médicalisé, dans cette chambre qui ressemble à un cockpit de Boeing. On ne peut pas le toucher ni lui parler. Nous devons éviter tout stimuli afin de ménager son cœur si fragile. C’est le plus difficile pour sa maman qui tremble en le regardant.  

On ne sait pas ce qui a causé son état, on cherche parmi plus de 10 000 virus. On effectue aussi une enquête génétique. Au bout d’une dizaine de jours, les soignants ont trouvé la parade au virus qui a assailli le cœur de notre petit, jusqu’à provoquer son arrêt. Il bat à peine à 5% de ses besoins. 15, 20%, ça monte doucement, on reprend courage et espoir.  

On prie dans la belle-famille, on espère de l’autre côté. Le soir, on se retrouve tous ensemble, grands parents, frères, sœurs, cousins, musulmans, juifs, athées ou catholiques autour d’une table, à la terrasse d’un café, à deux pas de l’hôpital. Ensuite, on raccompagne les enfants jusqu’à l’espace dédié au recueillement spirituel, comme chaque soir. On les regarde entrer pour prier, et on s’assied avec d’autres personnes que nous commençons à connaître. Une communauté diverse et solidaire qui entame la nuit qui tombe et qui fait peur. Et puis on espère, encore et encore.  

Chaque jour, après le travail, on file à l’hôpital. On connait de mieux en mieux les astuces pour trouver une place de parking et arriver aux soins intensifs le plus rapidement possible. Attente à l’accueil du feu vert pour entrer dans ce service sécurisé. Désinfection des mains, enfilage des chaussons, port du masque.  

De jour en jour, les enfants maigrissent, leur teint est effrayant. Ils mangent peu, ne dorment pas beaucoup, ils se relaient auprès du petit en cas d’urgence. Un médecin chef me dira que le pronostic est sombre. Et s’il s’en sort, quelles seront les séquelles neurologiques ?  

Du côté des grands-parents, c’est aussi difficile pour nous de rester sereins, calmes et attentifs pour les supporter de notre mieux. Être présent en filigrane, disponible pour accueillir leurs émotions, la peur, la tristesse et même la colère.  

Les jeunes parents s’épuisent, les reproches fusent entre eux quand ils se sentent débordés. « Tu aurais pu venir plus tôt pour prendre mon relai, tu as encore oublié ceci ou cela… Si je n’avais pas décidé d’aller aux urgences, le petit serait mort ! ». Les familles font bloc autour des enfants et essaient de passer outre. Malgré tout, le beau-père de mon fils s’emporte sur lui, devant moi. Il est débordé par ses propres émotions. L’ambiance est si triste et lourde qu’on ne sait comment réagir pour essayer de maintenir le bateau à flot.  

Dans ces moments-là, on aimerait, nous aussi, grands-parents, recevoir l’aide des psychologues du service. Garder une attitude juste, modérée, en soutien, sans trop essayer de savoir à tout prix quel est l’état réel de la santé de notre petit fils.  

Enfin, trois semaines sont écoulées, le cœur repart doucement. Il subit une opération qui le délivre des ECMO cœur-poumons. Il est très fragile mais sa maman et son papa peuvent enfin le tenir dans leurs bras, malgré les drains et les tuyaux. Il boit un biberon et me regarde d’un œil méfiant. Il a peur des blouses blanches et est aussi craintif qu’un jeune chat errant. Je tente sa petite chanson préférée : »Ainsi font, font, font les petites marionnettes » et il remue une main en esquissant un rapide sourire. Chaque jour, le même rituel de la petite chanson. Mon fils insiste pour que je la lui chante en boucle. Le petit apprécie et se détend. Des ours en peluche, des jouets inondent la chambre. Notre petit n’y prête qu’une attention très relative. La seule chose dont il a besoin, ce sont les bras de sa maman, dans lesquels il se recroqueville. Il est très amaigri et ses yeux noirs sont immenses au milieu de sur son visage encore gris.  

Encore une semaine au service de cardiologie. Il reprend des forces. Nous constatons tous ses progrès. Il mange de mieux en mieux. Il pourra bientôt rentrer à la maison. Cette même maison que les enfants ont désertée pour habiter chez les grands-parents maternels, le temps de l’hospitalisation. La famille s’organise pour nettoyer de fond en comble leur appartement et enlever toute trace du champ de bataille laissé derrière eux avant le départ pour l’hôpital.  

Ils avaient le projet d’un second enfant, un mois plus tôt. Mon fils me dit qu’ils ne sont pas en état et qu’il leur faudra du temps. C’est très compréhensible et même souhaitable après une telle expérience.  

Aujourd’hui, 7 mois après leur retour à la maison, ils y repensent à nouveau. La petite famille a repris ses activités et sa vie habituelle, ou presque. Mon petit fils est toujours sous héparine et est suivi tous les mois à l’hôpital mais il va bien. Hormis sa peur immense des soignants. Quant à moi, je peux enfin me replonger dans ce mois hors du temps et mettre des mots sur les maux, comme on dit souvent. 

C’est un miraculé nous dit l’équipe des soins intensifs, il revient de très loin : »Vous savez, nous prenons son exemple pour consoler des parents confrontés à la maladie cardiaque de leur enfant ! » 

En amont, c’est toute une équipe médicale qui s’est relayée sans relâche, infirmiers urgentistes et intensivistes, cardiopédiatres, neuropédiatres, généticiens, pneumologues, chercheurs… En contact avec d’autres grands hôpitaux pédiatriques en Europe ou ailleurs. Je n’oublierai jamais l’humanité et la disponibilité dont ils ont témoigné à l’égard des enfants mais aussi de la famille tout entière. Et c’est un vrai miracle quand on sait que chaque seconde est comptée dans un tel service.  

En tant qu’abuela, mon nom de mamie, emprunté à l’espagnol et en hommage à ma grand-mère, je me questionne encore aujourd’hui sur le rôle et la place du grand-parent à l’hôpital. Ce témoignage aidera peut-être d’autres grands-parents confrontés aux mêmes doutes et questions. Est-ce qu’on en fait assez, trop ? Comment soutenir son enfant pour qu’il puisse à son tour soutenir le sien ? Comment être présent sans prendre trop de place ? Comment faire taire ses émotions pour accueillir les leurs ? Comment écouter avec bienveillance et sérénité sans vouloir tout savoir ? 

Comment apaiser la tension et adoucir les paroles, jouer le rôle de médiateur sans parti pris ? Comment ne pas blesser l’autre dans ses convictions, sa foi ou sa spiritualité ? Et puis encore, comment reprendre des forces pour repartir au combat le lendemain ? Autant de questions que je me suis posé tout au long de cette épreuve sans nom et que d’autres grands-parents se poseront à leur tour dans une situation similaire… »

 E.V.

 

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Numéri’cap : le nouveau projet inclusif de FratriHa !

Toujours bien active pour aider les fratries des personnes porteuses de handicap mental, l’asbl FratriHa lance un nouveau projet intitulé « Numeri’cap ». L’objectif est le suivant : conscientiser les personnes en situation de handicap mental ainsi que leur famille à utiliser le numérique avec vigilance. En pratique, il s’agit d’ateliers, proposés gratuitement et en deux phases, permettant d’initier les participants à une meilleure compréhension de l’outil numérique.


FratriHa a décidé de diviser son projet « Numeri’cap » en deux parties. La première propose trois ateliers dédiés aux familles de personnes en situation de handicap, car sensibiliser en priorité les proches s’avère être nécessaire. La deuxième partie du projet se focalise sur l’utilisation du numérique pour les personnes porteuses de handicap mental.

→ Pour en savoir plus sur le projet 

→ Envie de s’inscrire aux ateliers Numéri’cap ?

Avec de la volonté…

L’équipe d’Hospichild partageait en juillet dernier un article dédié au podcast « Décalés » réalisé par Léa Hirschfeld. Pour rappel, il s’agit d’une série de podcasts – dont l’épisode « Hors série » de FratriHa – réalisés dans le but de mettre en avant des porteurs de projets en lien avec le handicap. Déjà, l’actuel projet Numéri’cap était mentionné et les deux initiatrices poursuivent ainsi leurs missions en soutenant, comme elles savent le faire, un public souvent marginalisé de personnes en situation de handicap mental et leurs familles. Et elles le font avec brio et en toute légitimité. Car, pour rappel, voici ce qu’on pouvait lire en guise de descriptif du podcast « hors série » : « Élise et Eléonore sont amies de toujours. Elles ont grandi dans la même rue et ont toutes les deux des frères et sœurs en situation de handicap. C’est à partir de leurs expériences personnelles et familiales qu’elles ont déployé les actions de FratriHa en Belgique. » La recette magique pour réussir un projet n’existe pas, mais il a de plus grandes chances d’aboutir lorsqu’on s’en donne les moyens. Vivement le projet suivant !

→ Pour (ré)écouter le podcast hors série sur FratriHa

Quelques mots sur FratiHa

Comme on peut le lire sur le site de FratriHa, il s’agit d’une initiative de soutien pour les fratries de personnes en situation de handicap mental. C’est en 2014 que les deux co-fondatrices Eléonore Cotman et Elise Petit développent leur projet. Entre 2015 à 2019, le projet a fait partie de l’asbl Inclusion avant de devenir une asbl à part entière en 2019. Les trois pôles principaux du projet sont « la sensibilisation et représentation », « les rencontres et le soutien » ainsi que « l’information ». Très prolifique, FratriHa organise régulièrement des ateliers ludiques à destination des enfants âgés de 6 à 11 ans et a développé son projet « Le p’tit baluchon » qui a reçu le prix « coup de pouce » du Fonds Gert Noel.

Une vidéo partagée par l’asbl FratriHa ↓

 

 

Samuel Walheer

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Aidants-proches : un documentaire sur ces héros du quotidien

En Belgique, il existe plus d’un million de personnes qui aident un proche au quotidien et de manière bénévole. Pour mettre en lumière tous ces individus qui agissent la plupart du temps dans l’ombre, des étudiants de l’IHECS ont réalisés un documentaire intitulé « Vivre pour l’autre ». Celui-ci dévoile le quotidien de trois aidants investis dans leur rôle et faisant face à leurs difficultés avec humilité. Un reportage à ne pas manquer et diffusé le 10 avril dernier dans l’émission « Investigation » sur La Une. L’occasion aussi pour l’équipe d’Hospichild de mettre en avant des institutions qui œuvrent depuis longtemps pour soutenir les aidants-proches comme l’asbl Aidants-proches ou encore le Réseau SAM. 


Ce documentaire montre à la fois le parcours de vie de trois personnes dévouées à leurs proches et également trois témoignages forts, reflets d’une multitude d’autres situations aussi dures les unes que les autres. En filigrane, il semble aussi être question dans ce reportage d’un reflet sociétal dans lequel nous pouvons percevoir les limites comme celles de nos institutions de santé, une population vieillissante ou encore les effets néfastes de la pollution sur la santé des nouvelles générations. Face à ce constat, l’aidant proche figure comme ce héros des temps modernes qui, on l’espère, continuera d’exister.

À (re)voir sur artbf auvio → Documentaire : « Vivre pour l’autre »

Un.e super-héros, vous dites ?

L’aidant-proche, c’est peut-être vous, votre voisin, un père, une mère et c’est surtout une personne sur dix en Belgique. Dominique, s’occupant depuis plus de quarante ans de son fils Thomas, ayant un handicap mental, déclare au sein du documentaire de l’IHECS : « Être aidant-proche, c’est aimer , tout simplement. » En d’autres termes, il s’agit d’une personne qui prend son rôle à cœur en faisant de l’aide sa priorité, en réalisant des actes (sur)humains, assumant seule des tâches quotidiennes – physiquement et psychologiquement épuisantes – et qui, bien souvent, passe inaperçue au sein de notre société. Ces actions sont exercées de manière ponctuelle ou sur une période plus longue envers un proche (parfois un enfant, souvent un parent vieillissant) qui se retrouve en perte d’autonomie, voire en situation de dépendance. Pour soutenir les aidants-proches, il existe heureusement, en Belgique, des institutions qui agissent, elles aussi, comme de vrais pansements pour notre société.

L’asbl « Aidants Proches »

Initialement créée à Namur en 2006 et avec le soutien de la Fondation Roi Baudouin, l’asbl Aidants Proches s’est par la suite rapidement étendue à Bruxelles ainsi que plus largement en Wallonie. L’association a réellement pris son envol en 2015 avec comme objectif de soutenir les aidants proches bruxellois. Depuis lors, celle-ci est bien active et a même dévoilé un Mémorandum que l’équipe d’Hospichild avait partagé via un article intitulé : « Aidants-proches : un Mémorandum en vue des prochaines élections ».

SAM, « Le Réseau des Aidants »

Autre association de soutien aux aidants proches : SAM, Le Réseau des Aidants.

 

Samuel Walheer

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